Classic Poem

Fay moy d'yne façon gentille,
Peintre, en ce tableau mon Bathylle,
Mon mignon, fay luy le poil blond,
Parfumé, noircissant au fond,
Le bout, iaunissant en la sorte
Que le poil d'or que Phebus porte.
Laisse libre son poil meslé,
Frizé, retors, & crespelé,
Comme il voudra, errer en ondes,
A l'entour du col vagabondes.
Puis fay que le tendre cerceau
Du sourci, plus noir que la peau
Des dragons, son beau front couronne,
Son front rousoyant, puis façonne
L'œil brun, doucement rigoureux,
Trampe d'vn appast doucereux:
L'vn retirant à Mars rebelle,
Et l'autre à la Cyprine belle,
Diuersement, à fin aussi,
Qu'estant tous deux meslez ainsi,
Oeilladant le doux, on espere,
Et craignant l'autre, on desespere.
Puis respan dessus le vermeil
De son teint, vn poil tout pareil
A cil qu'on voit, quand sur la branche
Au matin la Cognace franche
Iaunoye en son coion nouueau
Par dessus sa iaunastre peau,
Meslant vne honteuse grace
Tant que pourras dessus sa face.
Mais mon Dieu ie ne sçay comment
Tu pourras peindre proprement
L'honneur de sa bouche riante:
Fay la doucement attrayante,
Brief, si bien la contrefaisant,
Qu'elle deuise en se taisant.
Fay luy grand front, hé ma memoire
Outrepassoit le bel iuoyre
De son col, semblable à celuy
Du bel Adonis, puis fay luy
L'estomach mesme, & la iointure
Des deux mains du facond Mercure,
Le ventre rond & potelé,
Comme celuy du Cuisse-né.
Du beau Pollux fay luy la cuisse,
Fay luy son aine qui rougisse,
Son aine tendrette, où soit veu
Entre les deux vn petit feu.
Puis fay luy son, qui ne face ores
Que bien peu commencer encores
A se chatoüiller du desir
De Venus, & de son plaisir.
Hâ Dieu que ton art porte enuie
Aux plaisirs de ma pauure vie,
Me celant par sa cruauté
De son dos la tendre beauté!
Quant au surplus ie n'ay que faire
T'enseigner comme il faut pourtraire
Ses deux piés, voila ton payment,
Et te pry, change promptement
Cest Apollon à ton ouurage,
Et si tu fais iamais voyage
En Samos, sur ce mesme trait
Pein moy d'Apollon le pourtrait.