Chanson d'Ophélie, La

E LLE chante Ophélie, en tressant des couronnes
De ces petites fleurs que les champs verts nous donnent
Tout parfum, toute fraîcheur, en leur simplicité
Et le soleil sourit à sa jeune beauté.
Elle chante, inconsciente en sa douce folie,
L'âme ne sourit plus dans les yeux d'Ophélie
Elle chante, inconsciente, une étrange chanson
Son léger pas paraît la fuite d'un rayon
Tandis que le printemps autour d'elle rayonne
Elle chante en tressant sa dernière couronne

Et la blonde Ophélie errante au bord de l'eau
Ne sait pas que son pied effleure son tombeau

Près d'un fleuve, se penche en pleurant un vieux saule.
Comme un petit enfant qui monte sur l'épaule
De son aïeul souriant, ne craignant nul danger,
Elle monte sur l'arbre—un corps souple et léger.
Capricieuse elle veut, sur la branche ployante,
Suspendre sa couronne humble mais odorante
Et toujours en chantant sur les rameaux pleureurs
Elle monte, elle veut y suspendre ses fleurs

Mais un rameau se brise… Hélas la vierge tombe
L'eau souriante devient en un instant sa tombe

Mais ses blancs vêtements la soutiennent encor
Comme le cygne après son dernier essor
A l'heure de sa mort chante son chante suprême,
Avant de disparaître, Ophélie de même
Flottante encore sur l'eau, chante son dernier chant.

Et nul ne voit sa mort sauf le saule penchant
Hélas! Bientôt finit cette chanson étrange,
En un long dernier râle étouffé sous la fange.

Puissé-je ainsi mourir, les mains pleines de fleurs
En chantant jusqu'au bout, sans larmes, sans terreur
Chantant jusqu'à ma mort, entraînée quand même
Par le fleuve inconnu, mystérieux et suprême
Par le fleuve funèbre où va l'homme banni
Par le fleuve profond qui mène à l'infini,
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