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Ode Aux Belliqueuses Pantoufles

Dans vos cabinets verts d'où sortent les grands souffles,
Sous vos tiroirs de caisse encastrant les genoux,
Que vous avez d'ardeur à combattre pour nous,
Belliqueuses pantoufles!

Vous vous considérez. Le bleu de votre drap
Est du même tissu que le bleu des capotes.
Cuir noir? Peau souple? Et tous vous diraient cuir de bottes,
Culottes de Murat.

De nos guerres, vos pieds ont déjà la dentelle;
Vos esquifs allongés nous font une armada
Et vous portez devise en poupe: Delenda
Est Berlingo! dit-elle.

Se frisant la moustache et suçant des bonbons,

A Judith Gautier

Je vous offre un encens né dans son encensoir,
Une fleur, un parfum qui sera mort ce soir,
Destin de votre rêve aux champs de Césarée.
Il est doux, et la fleur est belle; mais un dieu
Tiendrait moins bien que vous ce frêle sceptre bleu,
Hommage d'un fidèle à votre main sacrée.

Durchwachte Nacht

Wie sank die Sonne glüh und schwer,
Und aus versengter Welle dann
Wie wirbelte der Nebel Heer
Die sternenlose Nacht heran!—
Ich höre ferne Schritte gehn—
Die Uhr schlägt Zehn.

Noch ist nicht alles Leben eingenickt,
Der Schlafgemächer letzte Türen knarren;
Vorsichtig in der Rinne Bauch gedrückt,
Schlüpft noch der Iltis an des Giebels Sparren,
Die schlummertrunkne Färse murrend nickt,
Und fern im Stalle dröhnt des Rosses Scharren,
Sein müdes Schnauben, bis, vom Mohn getränkt,
Sich schlaff die regungslose Flanke senkt.

Am Bodensee

Über Gelände, matt gedehnt,
Hat Nebelrauch sich wimmelnd gelegt,
Müde, müde die Luft am Strande stöhnt,
Wie ein Roß, das den schlafenden Reiter trägt;
Im Fischerhause kein Lämpchen brennt,
Im öden Turme kein Heimchen schrillt,
Nur langsam rollend der Pulsschlag schwillt
In dem zitternden Element.

Ich hör' es wühlen am feuchten Strand,
Mir unterm Fuße es wühlen fort,
Die Kiesel knistern, es rauscht der Sand,
Und Stein an Stein entbröckelt dem Bord.
An meiner Sohle zerfährt der Schaum,
Eine Stimme klaget im hohlen Grund,

Branche d'Amandier, La

De l'amandier tige fleurie,
Symbole, hélas! de la beauté,
Comme toi, la fleur de la vie
Fleurit et tombe avant l'été.

Qu'on la néglige ou qu'on la cueille,
De nos fronts, des mains de l'Amour,
Elle s'échappe feuille à feuille,
Comme nos plaisirs jour à jour.

Savourons ces courtes délices;
Disputons-fes même au zéphyr:
Épuisons les riants calices
De ces parfums qui vont mourir.

Souvent la beauté fugitive
Ressemble à la fleur du matin,
Qui, du front glacé du convive,
Tombe avant l'heure du festin.

Sonnet Orgueilleux

De son propre malheur l'homme est toujours complice.
La vie est un combat, et parmi ces essaims
De soldats, de bandits, de traîtres, d'assassins,
Tant pis pour qui va nu! Que le sort s'accomplisse!

Il faut se cuirasser, et que toute arme glisse
Sur le fer qu'on se plaque à même les deux seins.
Chacun doit se forger sa cuirasse, et les saints,
Comme ils n'ont pas d'acier, se bardent d'un cilice.

Moi, pour mieux tenir tête à tous coupe-jarrets,
J'endosse le cilice et la cuirasse après,
Et je mets au défi, mort-Dieu! qu'on m'assassine.

Blason Royal

Quittant l'écu royal qu'il défend et qu'elle orne,
Le Lion s'est jeté sur la blanche Licorne
Et dans son beau poitrail le monstre carnassier
Tient enfoncés ses crocs et ses griffes d'acier.
Ce lion, c'est la Force, et la bête qu'il blesse
Est l'emblème sacré de la pure Noblesse.

De l'écu Britannique ils sont les deux supports.

Médite le conseil du symbole héraldique,
Prince! Un Nil rouge coule à l'autre bout d'Afrique;
La vertu des vivants s'y trempe au sang des morts.
Impérial Edouard! Rentre au fourreau le Glaive;

O lèvres qui donnez le baiser—ô dictame

O lèvres qui donnez le baiser—ô dictame
D'une chair ciselée en corolle de fleur,
O lèvres qui priez, vibrantes de douleur,
Rives où vient mourir […]

O lèvres qui aimez—pourpre—vin d'or et flamme,
Urne ardente où le cœur boit à même le cœur.
O lèvres de la mère, où rayonne, vainqueur,
L'orgueil vivant jailli du ventre de la femme.

Linéament fluide où tient l'immense Amour
Et d'où monte et s'épanche en lumière alentour
Cette fragilité divine de sourire.

O lèvres de silence aux plis mystérieux
[. . . . . . .] tristes comme des yeux

Son rêve fastueux, seul, lui donnait des fêtes

Son rêve fastueux, seul, lui donnait des fêtes ;
Il avait son orgueil intime pour ami.
Grave, pour dérider un peu son front blêmi,
Il regardait ses fleurs et caressait ses bêtes.

Soumis à ses grands yeux étranges de prophète,
De beaux Désirs pareils à des tigres parmi
Les jungles de ses sens s'étiraient à demi
Il vivait seul avec son âme pour conquête.

Dans le palais silencieux qu'était son cœur,
Des femmes, que gardait secrètes son humeur,
Languissaient, comme des sultanes, près des urnes.

Lui, pâle, par les soits délirants de jasmins

Sylphe, Le

Je suis un sylphe, une ombre, un rien, un rêve,
Hôte de l'air, esprit mystérieux,
Léger parfum que le zéphyr enlève,
Anneau vivant qui joint l'homme et les dieux.

De mon corps pur les rayons diaphanes
Flottent mêlés à la vapeur du soir;
Mais je me cache aux regards des profanes,
Et l'âme seule, en songe, peut me voir.

Rasant du lac la nappe étincelante,
D'un vol léger j'effleure les roseaux,
Et, balancé sur mon aile brillante,
J'aime à me voir dans le cristal des eaux.

Dans vos jardins quelquefois je voltige,